Les Premières Nations innues qui négocient actuellement un traité avec les gouvernements du Canada et du Québec se félicitent du jugement de la Cour fédérale rendu le 1er décembre 2014 par le juge Yves de Montigny. Celui-ci reconnaît en effet la validité de la position innue voulant que la Nation huronne-wendat ne puisse opposer son veto à la poursuite des négociations.

Dans son jugement, même s’il conclut à un manquement de consultation de la part de la Couronne envers les Hurons-Wendat avant la signature de l’entente de principe en 2004, le juge de Montigny reconnaît en effet les arguments des Innus, qui étaient intervenants à la Cour, et rejette les autres prétentions des Hurons-Wendat. Ces derniers réclamaient un droit de veto sur toute signature d’un traité entre les Innus, le gouvernement fédéral et celui du Québec. Le juge de Montigny stipule qu’une telle ordonnance n’est pas justifiée : « Il serait inadmissible que la demanderesse puisse contrecarrer plus de 30 ans de négociations entre la défenderesse et les intervenantes, et opposer son veto à la conclusion d’un traité au seul motif que le territoire sur lequel elle revendique des droits n’a pas été intégralement exclu de son champs d’application. » Il apparaît donc clairement que les Hurons ne peuvent exercer un droit de veto quant à la signature d’un traité avec les Innus, puisque leur consentement n’est pas requis.

Rejet de la plupart des demandes huronnes

Un autre objectif des Hurons-Wendat était l’obtention implicite d’une reconnaissance de territoire exclusif, ce que le juge de Montigny n’a pas retenu tel que mentionné dans l’article 87 de son jugement : « Une simple lecture du Traité de 1760 révèle que l’assiette territoriale des droits conférés n’est pas définie. » La Cour fédérale confirme en effet que rien ne permet d’établir l’éventail des droits protégés par le Traité de 1760 ni leur contenu, leurs modalités d’exercice ou le territoire sur lequel ils peuvent être exercés.

Notons de surcroît que la grande majorité des demandes formulées par les Hurons n’ont pas été retenues par le juge de Montigny. Ainsi, la Cour n’a pas reconnu de droits ou de territoires aux Hurons, la décision ne portant que sur l’obligation de consulter de la Couronne fédérale. Le juge a statué qu’Ottawa n’avait qu’une obligation limitée de consulter les Hurons, tout en stipulant que le fédéral devait aussi tenir compte de ses obligations et engagements en vertu de l’entente de principe signée en 2004 avec les Innus. Tout en mentionnant que les Hurons ne pouvaient empêcher la conclusion d’un traité avec les Innus, la Cour a également refusé de retirer la Partie sud-ouest de la négociation.

Pour un partage équitable du territoire

Le juge de Montigny a confirmé dans son jugement que « la région comprise entre le Saguenay et le Saint-Maurice ne constituait pas des terres sur lesquelles existait un titre aborigène en faveur des Hurons, puisque ces derniers n’avaient pas la possession historique de ces terres, et que les Britanniques n’auraient vraisemblablement pas accordé des droits absolus qui pouvaient paralyser la Couronne dans l’utilisation de nouveaux territoires conquis ».

Ainsi, les droits de chasse à l’orignal dans la réserve faunique des Laurentides et dans la Partie sud-ouest de l’entente de principe de 2004 ne sont affectés d’aucune façon.

Pour les Innus de Mashteuiatsh et d’Essipit, il a toujours été clair que la Partie sud-ouest identifiée dans l’entente de principe devait faire l’objet de discussions avec les gouvernements avant la signature d’un traité final. On peut maintenant espérer la tenue d’un dialogue constructif concernant le partage du territoire entre nations autochtones.

À la suite de ce jugement, les chefs de Mashteuiatsh et d’Essipit demandent aux Hurons-Wendat de modifier leur approche dans ce dossier et de cesser de revendiquer un territoire exclusif allant du Lac-Saint-Jean à la frontière américaine, et du Saguenay au Saint-Maurice, pour entamer des discussions sérieuses avec le fédéral et les autres nations autochtones sur cet enjeu important.

Des discussions directes et franches

Les Innus de Mashteuiatsh et d’Essipit continuent donc de privilégier la tenue de discussions directes et franches avec les Hurons-Wendat, dans le respect du contexte historique relié à l’utilisation du territoire. Ils saluent la volonté manifestée par ceux-ci au lendemain du jugement, de s’engager dans une relation saine et positive avec les communautés innues concernées.