LETTRE OUVERTE

Trop peu de gens ont l’occasion de lire ou d’entendre parler de la présence historique et importante des Innus dans la région de Québec. Voici des éléments documentés et factuels de cette histoire qui permettent de comprendre pourquoi ce territoire fait partie de notre négociation territoriale et est inclus dans l’entente de principe que nous avons signée en 2004 avec les gouvernements du Canada et du Québec.

Lorsque Champlain s’est installé à Québec au début du 17e siècle, la région de Québec était considérée comme faisant partie du territoire innu, une situation confirmée par les écrits des premiers Européens. Champlain lui-même reconnaissait le contrôle exercé par les Innus dans la région de Québec, encore appelée Uepishtikueiau aujourd’hui.

Les membres d’autres nations autochtones s’y arrêtaient pour camper, mais ils utilisaient surtout le fleuve Saint-Laurent pour se déplacer sur de grandes distances. Ces nations reconnaissaient la région de Québec comme étant sous le contrôle des Innus, qui pouvait s’exercer par l’exigence d’un droit de passage.

Les Innus de la région de Québec étaient perçus par les premiers Européens comme formant un groupe relativement homogène qui vivait la plus grande partie de l’année dans les montagnes de la rive nord du fleuve Saint-Laurent. D’où le nom « Montagnais » qui leur a été attribué par les premiers Européens.

Les Innus ont beaucoup aidé Champlain et les premiers arrivants français à survivre dans la région de Québec, particulièrement lors du premier hiver de 1608-1609. Dès l’arrivée du printemps, le site de l’Abitation de Champlain à Québec était entouré de campements innus installés pour y faire le commerce des fourrures ainsi que pour la chasse et la pêche dans les environs. Les Innus ont montré aux Français comment pêcher sur la glace et comment chasser l’orignal, deux activités qui leur étaient inconnues.

Pendant l’automne, les Innus faisaient la pêche à l’anguille dans les environs de Québec, notamment dans un lieu appelé Kamiskoua Ouangachit (Anse de Sillery). Pendant l’hiver, les Innus se dispersaient en petits groupes familiaux à l’intérieur des terres pour la chasse au gros gibier et aux animaux à fourrure.

Lorsque la mission de Sillery a été mise en place par les Jésuites vers 1637, l'objectif était de sédentariser les Montagnais (Innus) et les Algonquins. Les Hurons y sont arrivés plus tard.

C’est vers 1650 que les Hurons sont définitivement chassés de leurs terres ancestrales de la Baie Georgienne (Ontario) par les Iroquois et viennent se réfugier auprès des Français dans la région de Québec. Ils s’installent au site actuel de Wendake vers 1697 pour y cultiver la terre et pour faire un peu de chasse et de pêche dans les environs. Les Hurons acceptent la prédominance innue dans la région et apprennent des Innus à faire la chasse au gros gibier sur un territoire que les Hurons ne connaissaient pas.

La colonisation française va forcer les Innus à se retirer progressivement de la région de Québec vers la fin du 17e et le début du 18e siècle.

C’est en 1760 qu’un sauf-conduit signé par le général James Murray accorde aux Hurons, qui étaient venus à lui pour se soumettre à la Couronne britannique et faire la paix, la protection de la Couronne et la liberté d’exercer leur religion, leurs coutumes et de commercer avec les Anglais. Suite à un jugement de la Cour suprême du Canada en 1990 qui a confirmé la valeur juridique du document, ce sauf-conduit de quelques lignes, sans référence à un territoire traditionnel ou historique, est présenté par les Hurons comme le « traité huron-britannique de 1760 ».

Charles-Édouard Verreault
Vice-chef aux relations avec les Premières Nations et les gouvernements
Première Nation des Pekuakamiulnuatsh